V.d.W. et M. Co.
Wouter Beke a présenté un rapport hallucinant aux
présidents francophones. La N-VA juge que le gouvernement Leterme prend
trop de libertés.
Même ceux qui, en toutes circonstances, affichent un optimisme
inaltérable, doivent bien le concéder : les négociations sont au point
mort. Et personne ne voit très bien comment sortir de limpasse
politique dans laquelle le pays est plongé depuis près dun an.
Simple
dramatisation, direz-vous. On en a connu dautres en 303 jours de
crise
Cela va durer quelques jours, puis chacun se remettra au
travail ? Oui, sans doute, mais le découragement gagne du terrain. De
surcroît, ce mercredi, il faudra passer par la case médiatisation que
la N-VA affectionne particulièrement. Résumons et clarifions.
Les
présidents des partis francophones attendaient la journée de mardi avec
une certaine impatience. Ils allaient enfin pouvoir rencontrer le
négociateur royal, Wouter Beke (CD&V), un homme quils navaient
plus vu depuis des lunes parce que le principal négociateur flamand, Bart De Wever (N-VA), sy opposait. Ce fut la douche froide. Glaciale, même. Pourquoi ?
Wouter
Beke a présenté à ses invités francophones un exposé assez détaillé de
létat davancement un euphémisme
des négociations. Powerpoint à
lappui : lhomme avait mis les petits plats dans les grands. Mais le
contenu de ce plat, les francophones ne lont pas digéré. Dans tous les
domaines abordés par le négociateur, les francophones ont décelé des
éléments totalement inacceptables pour eux. Lun deux témoigne : Cest
hallucinant. Cest un recul généralisé par rapport à tout ce que lon
nous a proposé. Dans certains chapitres, Wouter Beke est même en deçà de
ce que Bart De Wever avait inscrit dans sa fameuse note du mois doctobre
! On avait pourtant évoqué, il y a une quinzaine de jours, certains
rapprochements, en matière de soins de santé notamment, grâce aux
travaux conjoints de Laurette Onkelinx
(PS) et Jo Vandeurzen (CD&V). Même ces éléments jugés positifs à
lépoque ont disparu de la synthèse finale, au grand étonnement des
francophones. Pourquoi ? Les francophones y voient la main de la N-VA.
Que dire des chapitres sur Bruxelles et sur la loi de financement. Bruxelles ? Une
accumulation dexigences strictement flamandes. Et une disparition des
compensations francophones. Dans ce contexte-là, il ny a aucun accord
possible, tonne un autre francophone. La loi spéciale de financement ? Pareil.
On nous balance un seul modèle, le fameux split rate, qui organise, à
terme, lasphyxie de lEtat fédéral. Inacceptable pour nous, tranche ce francophone.
Le
grand reproche formulé par les francophones à légard de Wouter Beke
est celui-ci : les réformes envisagées semblent conduire tout droit vers
la scission du pays.(1) Il ny a rien, que ce soit dans le chapitre sur
Bruxelles ou celui sur la Loi spéciale de financement, qui pourrait
constituer un verrou et faire en sorte que jamais la Belgique
ne se disloque. Les francophones ne voient donc pas quel avantage
politique, économique, stratégique ils auraient à mettre le doigt,
la main, le corps dans cet engrenage dont la manivelle semble avoir été
programmée par les nationalistes flamands dont on connaît la feuille de
(dé) route.
Le problème est quil ny a pas que les francophones
qui sestiment découragés. Recevant, tour à tour, les présidents
flamands car Bart De Wever ne voulait pas que trois présidents
flamands se réunissent en son absence
, Wouter Beke leur a laissé
entendre que les francophones ne voulaient rien.
Cerise sur le
gâteau, si lon ose dire, la N-VA va hausser le ton, ce mercredi à
11 heures. Un mot dexplication est nécessaire pour comprendre le coup
de gueule de la N-VA. La Belgique, comme les 26 autres pays de lUnion,
prépare en ce moment ce que lon appelle le Semestre européen, un
document qui contient à la fois un plan national de réforme et un pacte
de stabilité, qui définit les orientations budgétaires du gouvernement.
Les données sont dailleurs assez bonnes puisque notre pays compte
réduire son déficit à 2,8 % en 2012 et sa dette à 88 % du PIB en 2015
(lire ci-contre).
La N-VA nentend pas laisser le gouvernement en
affaires courantes présenter ces propositions présentation prévue la
semaine prochaine sans quil y ait un véritable débat parlementaire et
un vote de confiance ! Il y a quelque temps, la N-VA avait demandé à
être associée à la préparation de ces réformes. Refus poli du
gouvernement au motif que la N-VA est toujours dans lopposition. Pour
la N-VA, cen est trop. Elle sapprête à dénoncer ces petits jeux et
exige un vote de confiance. Dans un seul but : démontrer que le
gouvernement Leterme na plus de majorité en Flandre
ou plus de majorité tout court. Car sil y a bien une chose que la N-VA
ne supporte pas, cest de voir que le gouvernement, en affaires
courantes, travaille et réforme.
Pendant ce temps-là, Wouter
Beke continuera à occuper le terrain jusquà ce que la N-VA pointe le
pouce vers le bas. Les francophones qui espéraient que les
démocrates-chrétiens flamands se déscotchent, même un mini-poil, des
nationalistes, voient leur rêve partir en fumée. Pendant ce temps-là,
grâce aux Belges, léconomie tourne. Et les perspectives sont plutôt
bonnes. De quoi retrouver, quand même, un brin doptimisme...
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(1) Zijn ze daar nu pas achter?