Rabbiner Dr. Mendel HIRSCH
(1833 1900)
Humanisme et Judaïsme (Septième partie)
Das reine Menschentum im Lichte des Judentums (1893)
Par Dr. MENDEL HIRSCH Directeur des écoles communautaires religieuses israélites, Frankfort-on-Main.
La même caractéristique de l'universalité est également clairement exprimée dans les commentaires rabbiniques de certains passages de la Bible concernant les justes et les bons, qui vont résolument à l'encontre de la notion d'exclusivité nationale. Ainsi sur Isaïe, 26, 2: «Ouvrez les portes» - non pas que les Prêtres, les Lévites et Yisroel, mais qu'un peuple juste et fidèle puisse y entrer ». Et sur les Psaumes 118, 20: "Ceci est la porte de Dieu" - ne se réfère pas aux Prêtres, aux Lévites et à Yisroel, mais il est dit - "les justes entreront". Encore dans les Psaumes 33, 1: Réjouis-toi - pas les Prêtres, les Lévites et Israël, mais Réjouis-toi en Dieu, Justes et enfin, sur les Psaumes 125, 4 mais - Sois bien, ô Dieu, à ceux qui sont bons (Torath Cohanim sur Lévitique 18, 5)
Ces passages n'ont pas besoin d'être commentés.
Si ce qui précède représente le point de vue du Judaïsme sur le sujet humain, nous devons encore considérer leffet pratique que cet enseignement a eu dans la Loi Mosaïque et dans les Prophètes, ainsi que sa continuation dans la compilation Rabbinique du rituel.
La justice et l'amour universel sont les principes fondamentaux sur lesquels La Bible base toutes ses Lois régissant les relations entre les hommes. Quelle est alors la mesure de protection légale pour le non-juif, quelle revendication de la charité la Bible lui accorde-t-elle sur la base de la Loi Divine?
Linstruction de la Torah a une méthode particulière pour établir et expliquer des principes généraux au moyen dexemples concrets, en choisissant délibérément des cas dans lesquels on chercherait le moins de preuves pratiques du principe sous-jacent et en permettant ainsi à la conclusion générale de se résoudre automatiquement.
Lorsque, par exemple, le devoir de gratitude est enseigné, la Torah choisit comme exemple un Égyptien et commande : «Ne déteste pas l'Égyptien». Car - quel que soit le préjudice indescriptible quils vous ont infligé par la suite, ils vous ont tout dabord réservé un accueil hospitalier.-
-Lorsqu'elle a l'intention d'enseigner le devoir de considération et de raffinement du ressenti humain, l'exemple choisi est un «voleur» condamné à un service temporaire, afin de racheter ce vol. Son maître est non seulement obligé de prendre soin de la femme et des enfants de son serviteur, mais est également mis en garde de faire preuve de la plus grande miséricorde et de la plus grande considération dans son traitement au coupable lui-même.- Lors de l'établissement des principes du droit matrimonial et du respect et du maintien dus à une épouse, la Torah choisit comme exemple la petite fille d'un mendiant qui, dans des conditions humbles, entra dans la maison d'un patricien et fut prise pour épouse par son fils .
En considérant tout d'abord à quel point la charité envers un frère non-Juif doit être démontrée et démontrée de manière concrète, nous constatons que la Loi Divine établit sa doctrine en énonçant le cas suivant: un homme qui, selon le Droit International alors en vigueur, était déclaré hors-la-loi, sans défense, sans amis, sans ressources et désespéré, était devenu l'esclave d'un Juif étranger, avait enfreint la loi au détriment du maître Juif et s'était enfui du pays étranger en territoire Juif. Pauvre misérable: De la poêle au feu (de mal en pis). Un grand nombre de nos États modernes hautement civilisés nauraient pas hésité à expulser un étranger aussi vagabond et indésirable, qui, sans preuve didentité ni de moyens de subsistance, devait devenir un fardeau pour le pays, et il pourrait se considérer chanceux sil échappait dêtre jeté de lautre côté de la frontière, dans le pays même quil avait le plus de raison de craindre. Mais, malgré son prétendu manque de charité, la Loi Biblique ordonne différemment.
Elle prescrit (Deutéronome, 23, 16, etc.): «Tu ne livreras pas à son maître un esclave qui s'est échappé de son maître vers vous. Il habitera avec vous, même parmi vous, dans le lieu qu'il pourra choisir dans l'une de vos portes, où il préférera: vous ne blesserez pas ses sentiments ».
Si cest la mesure de lamour et de la sollicitude philanthropique que létranger complet pouvait légitimement attendre, sur la base de la Loi Divine, juste parce quil était un être humain et totalement sans défense, ce nest que logique de déduire que la Loi qui commande le Juif de prendre soin de son frère non-Juif, qui a renoncé à l'idolâtrie - un «étranger vivant avec toi» - ne signifie pas restreindre ses directives d'aide charitable au frère déjà tombé.
Au contraire, il lui faut également soccuper dun frère «à fortune réduite» « moins fortuné », qui peut encore se maintenir soi-même «à vos côtés» et qui na pas encore besoin dadmirer son compagnon Juif comme son généreux protecteur et son noble bienfaiteur. Car il est noble de relever ceux qui sont tombés, mais il est Divin de les empêcher de tomber. Et avec cette conviction, il est très caractéristique que la Torah insère, dans cette loi, l'idée de veiller à l'entretien du résidant non juif: «Et quand» - lit-on dans Lévitique, 25, 35 - «ton frère est entrain de perdre sa fortune et il trébuche à tes côtés, alors soutiens-le, même s'il n'est qu'un étranger devenu un résidant, afin quil puisse vivre avec toi ».
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