Rabbiner Dr. Mendel HIRSCH
(1833 1900)
Humanisme et Judaïsme (deuxième partie)
Das reine Menschentum im Lichte des Judentums (1893)
Par Dr. MENDEL HIRSCH Directeur des écoles communautaires religieuses israélites, Frankfort-on-Main.
Compte tenu des notions répandues au sujet de la religion Juive, la plupart des gens vont probablement le prendre pour acquis, quun seul avis est possible et peuvent exprimer la surprise quun tel point soit soulevé, à supposer que la réponse soit évidente. En effet, comment le Judaïsme pourrait-il séparer ses adhérents aussi soigneusement qu'il le fait, et les séparer, comme le dit le poète, même "à fond", ne fait-il que totalement rejeter le principe de l'universalité? Cependant, en des temps comme le présent, qui accentuent sans ménagement tout ce qui divise les hommes, il serait extrêmement opportun de dresser un bilan de ces idéaux considérés consciemment ou inconsciemment par tous les hommes communs comme des hommes élevés et sacrés. Un examen attentif de la position adoptée par le Judaïsme à ce sujet sera donc d'un grand intérêt. Car aucune religion n'est aussi peu comprise et mal comprise que le Juif.
Laissez-nous définir la question plus précisément. Le Judaïsme reconnaît-il ce principe d'humanisme pur? Admet-il sa justification et sa réalité? Que pense-t-il des païens, non convertis au Judaïsme, mais qui croit en Dieu et qui accomplit fidèlement tous les impératifs de la justice, de l'humanité et de la moralité? Le Judaïsme le considère-t-il comme l'un des enfants de Dieu? un tel homme peut-il, à la lumière de la foi Juive, espérer son salut?
Une référence à la Bible prouvera que c'est précisément le Judaïsme, précisément l'Ancien Testament, qui fournit l'origine même et les bases de la conception de l'humanisme pur dans sa réalisation la plus complète et dans son affirmation la plus positive.
L'Ancien Testament, cet enregistrement le plus ancien du genre humain, cette source de toute connaissance de Dieu et de l'humanité, ce livre que les Juifs, malgré un martyre sans pareil, ont chéri pendant des milliers d'années comme leur plus grand trésor et la clé de leur propre et dans toute la rédemption de l'humanité, l'Ancien Testament ne fait pas précéder son enseignement d'une déclaration comme celle-ci: Avant la révélation sur le Sinaï ou à Abraham, tous les hommes étaient condamnés et incapables d'atteindre le salut. Au contraire, cela commence par la doctrine édifiante selon laquelle tous les hommes sont à l'image de Dieu (Gen. I, 26). Car ce n'est pas le Juif mais l'homme, qui est représenté comme la pierre d'achoppement et le but suprême de la création (Gen. I, 26); et ce n'est pas le Juif mais l'homme à qui est attribué le caractère «Adam». Pourtant, dans cette doctrine, tout le destin du genre humain est énoncé. Car «Adam» ne signifie pas «motte de terre».
Étymologiquement, le mot «Adam» nest pas dérivé de «Adamah», la terre, mais «Adamah» est évidemment dérivé de «Adam», la terre étant désignée comme le «sol de lhomme», le domicile et le porteur de lhomme. Indépendamment de cela, il ne serait pas logique de qualifier lhomme de «né de la terre», en raison de la partie terrestre de son origine, vu que la caractéristique dominante de lhomme, soulignée par la Bible, est que son corps terrestre nest devenu «lhomme» que par Le souffle de Dieu, et donc par son origine, n'appartient pas entièrement à la terre. Selon les recherches de profonds biblistes et philologues, «Adam» représente lhomme dans sa plus haute dignité, en tant que «fiduciaire de la gloire divine sur la terre», en tant que «sceau de Dieu sur la création», en tant que «représentant de Dieu sur la terre». Tout cela, impliqué par le mot «Adam», n'est pas dit (ibid: 15,7) «Dieu a soufflé dans ses narines le souffle de vie et l'homme est devenu une personnalité vivante»
Ainsi, l'anthropologie biblique, qui ne connaît qu'un seul ancêtre pour toutes les races, confère une double supériorité à tous les hommes, par leur descendance d'Adam; à savoir, la possession d'une âme, qui n'est pas faite de la poussière de la terre, et d'un corps, dont la formation, malgré son analogie avec l'organisme animal, le Créateur se voulait spécifiquement différent de celui du corps animal, en le rendant apte à son destin supérieur et en voulant qu'il soit, pendant la vie, un cadre et un instrument appropriés pour le souffle divin qui y habite.
Ce point est dune importance fondamentale. L'enseignement de la Bible confère ainsi à l'homme le pouvoir de se contrôler. Si, par conséquent, pour l'accomplissement des devoirs humains généraux, chaque homme est appelé - et, pour celui des devoirs Juifs spécifiques, chaque Juif est appelé - à subordonner ses instincts et appétits sensuels aux ordres de la morale.
(à suivre)
Rabbiner Dr. Mendel HIRSCH: Humanisme et Judaïsme (première partie)
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