Quand le CRIF provoque lantisémitisme
Par Rudolf Bkouche
IRIB - Taguieff avait raison lorsquil parlait dune nouvelle judéophobie
même sil ne voulait pas comprendre ce quelle signifiait. Nouvelle judéophobie en ce sens quelle attaquait non les anciens parias de lEurope victimes des persécutions antijuives mais ceux qui, en construisant lEtat dIsraël, avait dépossédé les habitants de la Palestine de leur terre et qui continuaient loppression des Palestiniens à travers loccupation, lApartheid et la colonisation qui nest autre quune forme dannexion de morceaux de terre palestinienne, mais une annexion précédée par lexpulsion des habitants.
Car le sionisme, même sil sest constitué en réaction à lantisémitisme européen, est devenu, en conquérant la Palestine, un nationalisme extrême comme lont été le nazisme et le fascisme, pratiquant la purification ethnique pour construire un Etat juif, purement juif. Pour le sionisme, il faut que lEtat soit juif pour quil puisse être démocratique et on peut renvoyer à cette phrase de Ben Gourion, citée par Sternhell dans son ouvrage Aux origines dIsraël :
"La démocratie est notre roc et le seul fondement de notre croissance. Mais nous devons tenir compte dun principe supérieur à ceux de la démocratie : la construction dEretz-Israël par le peuple juif" [1]
Il faut alors comprendre le rôle dune officine sioniste comme le CRIF dans sa volonté moins de lutter contre lantisémitisme que duser du développement de lantisémitisme comme une façon dabord de rassembler lensemble des Juifs autour du soutien à lEtat dIsraël, ensuite dappeler le monde occidental à soutenir lEtat dIsraël au nom de la lutte contre lantisémitisme.
Ainsi le sionisme qui sest construit en réaction à lantisémitisme a besoin de lantisémitisme pour soutenir sa politique.
On voit ainsi aujourdhui, comme on la déjà vu antérieurement, le CRIF, entouré dautres organisations juives, appeler à une manifestation de soutien à Israël au moment dune agression meurtrière contre les habitants de Gaza. Une telle manifestation ne peut que renforcer des sentiments antijuifs et cest bien ce que cherche le CRIF.
Si une telle manifestation provoque quelques slogans antijuifs dans les rangs de ceux qui manifestent pour soutenir les Palestiniens, ce sera un prétexte de plus pour proclamer que toute manifestation de soutien à la Palestine est une manifestation antisémite. Et le CRIF sait quil a le soutien des autorités françaises en la personne du président de la République et du premier ministre. On sait aussi que la Ligue de Défense Juive saura provoquer les incidents nécessaires permettant aux autorités françaises dinterdire les manifestations de soutien à la Palestine sous le prétexte de la préservation de lordre public.
On pourrait parler, à propos de lattitude du CRIF, de nationalisme juif, un nationalisme qui demande à tout Juif de considérer lEtat dIsraël comme sa vraie patrie et de le soutenir inconditionnellement. Quimporte alors si ce nationalisme juif provoque de lantisémitisme, au contraire plus les Juifs craindront lantisémitisme mieux le nationalisme juif se développera.
La référence à la condition de paria des Juifs dEurope et aux persécutions antijuives est devenue, pour le sionisme et ses séides, une forme de propagande et en ce sens cette instrumentalisation des persécutions antijuives ne vaut pas mieux que le négationnisme ; que ce soit la négation de la Shoah ou que ce soit lutilisation dicelle comme argument de propagande sioniste, cest la même abjection. Cest cela quil faut rappeler au CRIF et à ceux qui, au nom de je ne sais quel philosémitisme, se croient obligés de soutenir les positions du CRIF et la politique israélienne.
[1] Ben Gourion cité par Zeev Sterrnhell, Aux origines dIsraël (1996), p. 388
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