Hortense nous casse les oreilles avec un téléphone portable que son papa vient de lui offrir. Un truc à mettre les nerfs des parents en pelote, qui fait des sonneries égrillardes et diffuse du vacarme qui voudrait ressembler à de la musique. Elle est très concentrée, impossible de lui arracher un sourire Il y a deux semaines encore, on aurait bien juré que jamais on naurait le mauvais goût de lui acheter une chose pareille Il va falloir quon se surveille.
Jespère quaucun voisin nessaie de faire la sieste dans la chambre dà côté Cest presque pire quune colère dHortense. (mais quand-même moins inquiétant pour les parents!(Luc))
Aujourdhui, nous avons visité le temple du ciel. Cétait plus adapté aux enfants que la Cité interdite: ils ont pu marcher un peu à leur rythme. Le temple est lendroit où les empereurs des dynasties Ming et Qing ( la 6e et la dernière) venaient se recueillir et le seul endroit où ils sagenouillaient, reconnaissant ainsi que le ciel était plus grand queux-mêmes.
Le grand et le petit temple sont très beaux, avec leurs ornements bleu, rouge et or. Ils sont précédés dune esplanade en hauteur avec une acoustique très particulière qui concentre les sons en son centre. Cest à cet endroit quont eu lieu les manifestations pour fêter lattribution à la Chine des prochains jeux olympiques. Des soldats nous ont demandé de ne pas rester, parce quon attendait dix minutes plus tard des personnalités . Lesquelles? Ils ne savaient pas. Et si cétait le prince Philippe ( pour les Français, cest le prince héritier de Belgique) actuellement en visite à Pékin? Le groupe a alors commencé à attendre. Je suis allée faire marcher Hortense sous les vieux arbres du parc, où jai rencontré un groupe de quatre marseillais avec un jeune guide chinois très sympathique. Pendant ce temps là, pour les Flamands, lattente a été vaine: la personnalité en question nétait pas le prince, et même pas un belge Dommage.
Mais le véritable spectacle était dans ce parc, où des Chinois chantaient en chur pour le plaisir, dautres jouaient à un jeu de raquettes très lent avec des mouvements de tai-shi: Luc a tenté lexpérience, et ses années de pratique du badminton pendant ses vacances au Coq dans sa jeunesse lui ont permis de sen tirer avec les honneurs. Un peu plus loin, des chinois de tous âges dansaient: rock, tango, valse, mais là encore, avec des mouvements lents, ronds, concentrés et apaisants de tai-shi. Dans les allées, des hommes jouaient au xiangxi, une sorte déchecs chinois, avançant leurs pions sous lil attentifs dun groupe de connaisseurs. Les Chinois aiment jouer, chanter, danser bouger ensemble, rire ensemble, observer ensemble. Chez nous, jai limpression que cette faculté à être ensemble se perd un peu après ladolescence.
Luc a réussi à échanger le téléphone contre des boîtes à encastrer Quel super papa! ( Je viens de découvrir le point dexclamation sur lordinateur! Je vais essayer de ne pas en mettre partout!)
Il est 21 heures maintenant. Hortense nous casse à nouveau les oreilles, mais cette fois avec ses hurlements. Elle lutte contre le sommeil. Difficile de savoir quoi faire: céder? Elle ne sait pas sortir de sa colère. Bon, on a déjà essayé de chanter, de souffler doucement, de lui faire un câlin tout en la laissant dans le lit, de lui masser le ventre, de lui passer sa grand-mère au téléphone ( ça ne la calmé que temporairement). Qui a une idée? Nous sommes preneurs!
P.S. Papa a acheté le téléphone afin déviter quHortense ne joue toujours avec le vrai téléphone de la chambre de lhôtel. (Luc)
Place Tian an Men, Cité interdite. Trois heures pour les arpenter sous un soleil de plomb.
La place dabord. Gigantesque. Et soudain, inattendue, lémotion. Jai pensé à la révolte des étudiants réprimée dans le sang. Cétait ma génération et jétais alors journaliste, sans doute plus concernée encore par la marche du monde et ses combats. Certains vivent aujourdhui en occident. Et écrivent. Cest avec leur plume quils racontent leur Chine.
Jai pensé à eux qui désormais ne peuvent plus arpenter ces lieux comme le font les multitudes de touristes, les familles en pèlerinage, les Pékinois en balade. Cest juste ce moment qua choisi le groupe pour faire une photo tous ensemble tant pis, je ny suis pas.
La visite de la Cité interdite sest faite au rythme des poussettes à porter, ou à pousser sur le cahot des pavages à refaire. Dans un an, pour les jeux olympiques, tout sera parfait. Certains bâtiments sont encore en train dêtre restaurés, et dans certaines salles, du mobilier est encore à labri sous des housses.
La palais construit en 1401 sous la dynastie des Ming ( la 6e), est impressionnant dabord par ses dimensions. Les cours nen finissent plus de se succéder. Pour tout visiter, il y faudrait au moins deux jours selon monsieur Liu. Nous navons pratiquement rien vu des 8999 salles qui composent le palais. Tout au bout, cest la partie la plus « interdite», celle où se trouvaient les femmes, officielles ou concubines. Une sorte de prison aux toits dorés. Il y a aussi un petit parc plein de charme, mais qui devait se révéler bien étroit quand ses murs formaient pour ses promeneurs le seul horizon possible.
Hortense a fait la première partie de la visite dans les bras de Morphée. Et elle a pris son repas de midi à lombre de lune des dernières cours . Un luxe. Monsieur Liu nous a proposé de prendre des audiophones pour avoir les détails dune histoire très riche, mais pour le moment, nous sommes plus parents que touristes.
Pour les enfants, cétait à nouveau une journée fort éprouvante avec sa litanie habituelle: embouteillages, visites, repas de midi sur le pouce, sieste retardée Hortense a eu encore deux moments difficiles, mais la deuxième fois, Luc a su la calmer. Après le repas du soir, elle a encore beaucoup joué, allant de Luc à moi en contournant toujours les autres parents: le fameux « attachement», pierre dangle de ladoption dont on nous rabat les oreilles durant la préparation, semble en très bonne voie.
Au programme, journée libre. Ou presque. Nous avons fait ce matin 1 h 30 de bus, pour atterrir dans une petite rue du vieux Pékin avec ses boutiques, préservée de la destruction pour le plaisir des touristes. Cette rue se trouve en bordure du Hutong, le quartier ancien et populaire de la capitale, que les touristes traversent en rickshaw et je ne peux pas mempêcher quand je vois ces hommes tirer de gros occidentaux, ou dautres bien plus misérables qui transportent des monceaux de combustibles pour le chauffage, au héros du «pousse-pousse» de Lao She, le grand écrivain chinois que lon a sans doute «suicidé». Quand ces hommes rentrent chez eux, à quoi cela ressemble-t-il? Quelle famille les attend? Viennent ils de la province? Et comment nous voient-ils, nous, Occidentaux?
Nous sommes partis à six couples et nous sommes restés seuls. Certains ont eu peur des puces ( mais nous navons pas caressé les chiens, et jai mis du produit répulsif sur les jambes dHortense et les miennes ).Dautres avaient envie daller visiter « Les Champs Elysées de Pékin», c'est-à-dire une avenue avec les grandes marques internationales de luxe, et des cafés mais si jai bien compris, cela nexiste pas vraiment à Pékin: ce genre de magasins se trouve souvent rassemblé dans de gigantesques centres commerciaux sans âme...
Bref, le bus est reparti, et nous sommes allés nous promener le long du lac qui longe le Hutong, avant dy faire une incursion. Nous avons «bavardé» un peu avec quelques femmes, puis avec les jeunes photographes dun mariage qui avaient très naturellement retournés leurs appareils sur Hortense. Nous devrions y revenir en groupe, mais cette promenade à trois nous a fait du bien. La vie de groupe na rien de naturelle, et elle empêche souvent la rencontre, ou tout simplement le fait de pouvoir «sentir» un nouveau lieu, den prendre possession à son rythme.
Pour retourner, nous avons pris un taxi qui a mis 20 minutes pour nous reconduire à lhôtel: il ny avait plus dembouteillages. De ce côté-là, malgré ses six périphériques, Pékin ressemble à Paris. Le chauffeur ne parlait pas un mot danglais, mais nous avons pu apprendre quil habitait Pékin et quil avait deux enfants. Hortense a mis des miettes partout sur la banquette arrière, mais jai dû choisir entre les miettes, ou lentendre hurler en continue pendant tout le voyage.
Car aujourdhui, Hortense nous a montré de quel souffle elle disposait quand elle décidait de crier, pour tout et pour rien. Du coup, nous avons jugé que nous ne pouvions plus attendre dêtre rentrés à la maison pour lui dire beaucoup plus souvent «non». Aujourdhui, nous avons eu droit à la version très colérique de notre fille. Mais ce soir, après le dîner , quand tous les enfants se sont mis à jouer sur la petite estrade, elle nous a une fois de plus confirmé à quel point elle était joueuse, rieuse, débordante dénergie, coquine aussi.
Une chambre dhôtel nest pas un lieu conçu pour lépanouissement dun enfant . Elle doit trouver bien bizarre notre façon de vivre. Patience. Dans une semaine, nous serons dans lavion du retour.
« Soleil radieux», tel aurait pu être le prénom dHortense aujourdhui. Même la toilette et le coucher nont donné lieu à aucune larme. Elle était pourtant très très fatiguée en en même temps, dans ces moments là, on a limpression que toute son énergie a besoin de se décharger très fort
Aujourdhui, le Palais dété sous un ciel blanc et brumeux av ait tout de même du charme, mais il fallait un peu dimagination pour sabstraire de la foule, et se projeter dans le passé, à lépoque des Qing, quand la reine mère y retenait lempereur son fils prisonnier . ( cette fois, il sagit de la 7e et dernière dynastie. Le nom de la première dynastie est presque le même, au ton près ).
Le Palais est dabord un espace avec quelques bâtiments dhabitation, un temple, le fameux bateau en pierre sur le lac, et six pavillons. Il est aujourdhui situé dans Pékin même, mais à lépoque, il se trouvait à lextérieur. Et avec son lac ( nous avons fait un tour en bateau) et ses grands arbres, il permettait de jouir dune fraîcheur ( toute relative) par rapport à la Cité interdite.
Hortense a fait la visite moitié dans la poussette, moitié sur mon ventre ce qui lui a valu une belle descente en toboggan quand jai glissé sur une pente de poussette que javais voulu prendre un peu vite comme raccourci Jai eu une dizaine de Chinois pour me relever. Mais Hortense na pas bronché.
Tout juste a-t-elle montré quelque impatience fort compréhensi ble quand au retour, à lheure de sa sieste, le bus sest arrêté dans un grand magasin de six étages avec une multitudes de boutiques qui vendaient surtout de la contrefaçon. Luc a protesté auprès dune vendeuse, qui après avoir jur é quil sagissait darticles dune grande marque, nous a dit quil suffirait à laéroport de couper létiquette. Et comme Luc insistait, elle nous a demandé ce que nous venions faire en Chine, si ce nest acheter des faux pour pas cher Il a montré Hortense, et là, elle na plus eu dargument
Hortense est vraiment comme une fleur qui souvre, de plus en plus à son aise. Elle communique beaucoup, sénerve parfois, joue énormément, apprécie toujours autant les câlins Et je ne suis pas sûre quelle ait bien la notion du «non» dans le sens de linterdit. Mais après tout, nous sommes là pour ça aussi
Sur les photos, le monsieur est notre guide, Monsieur Liu. Il est de Nankin, la première capitale, qui se trouve au sud de la Chine, à un millier de kilomètre de Pékin. ( Nan veut dire Sud, et Bei ( de Beijing= Pékin) veut dire nord ). Il a fait des études de français à la fin de la Révolution Culturelle ( Il a 55 ans ). Les universités ouvraient à nouveau, mais il na pas pu choisir sa discipline. Quand il ne sert pas de guide à des groupes de flamands qui viennent chercher leur enfant, il profite de sa retraite pour continuer ses études de médecine. Il a commencé par le massage thérapeutique, ce qui ma été dun grand secours au début de notre voyage. Il pose les diagnostiques dune façon inattendue pour nous, mais qui nous replace dans une autre perspective. Ce midi, pendant un moment de pause, il a fait son tai-shi: il se contente de trois mouvements seulement, ceux qui lui conviennent pour prendre conscience de lair qui nous entoure
Pour envoyer un email, clicquez ci-dessus sur "EMail mij !" (en bleu), ensuite vous remplissez les champs (obligatoirement ceux avec asterisques) comme suit : "Onderwerp" = sujet, "Bericht"=votre message, "Email"=votre adresse email et "Veiligheidscode"= la combinaison de lettres et chiffres que vous voyez dans le cadre. Si ils sont difficiles à lire, cliquez à la 3ème lignepor obtenir une nouvelle combinaison. Après vous clicquez en=dessous sur "Verstuur een email". Votre email est envoyé, vous revenez après quelques instances sur le blog.